Le 12 octobre dernier, la loi pour la modernisation de la justice du XXIe siècle était définitivement adoptée. Parmi toutes les mesures de « modernisation », l’une d’entre elles n’a pas fait la Une des journaux, sans grande communication du gouvernement, et est finalement passée inaperçue aux yeux de l’opinion publique. Pourtant elle aura un impact certain sur l’organisation de l’activité des entreprises de transport routier. Il s’agit de l’obligation faite désormais aux chefs d’entreprises de dénoncer leurs salariés ayant commis une infraction à la vitesse ou à la circulation au volant de l’un des véhicules de l’entreprise. Autrement dit pour nos activités, la dénonciation, sous peine de sanction, des conducteurs !

Cette obligation de délation a été faite en dépit de tout bon sens et constitue désormais une bombe à retardement. Elle s’apparente à une double peine pour nos entreprises. Malgré tout cela, et les nombreuses interpellations de la présidente MESPLES, le gouvernement est resté sourd. Le secrétaire d’État aux transports, Alain VIDALIES, a réaffirmé dans son discours au 16e congrès national de l’OTRE que cette obligation sera maintenue au nom de la sécurité routière et de la responsabilité des chefs d’entreprises d’en être des acteurs actifs. Avec cette affirmation, le secrétaire d’État oubliait tout de même que les transporteurs engagent déjà très fortement leur responsabilité en envoyant sur les routes des conducteurs professionnels qui roulent plus de cent mille kilomètres par an, pour un taux d’accidentologie quasi nul !
Mais revenons sur la double peine. D’une part, cette injonction de délation interviendra après un contrôle automatique, dont on connaît la fiabilité. Comment contester l’infraction et en même temps en dénoncer le présumé auteur ? Comment empêcher par exemple un poids lourd qui tourne dans un virage à angle droit de mordre une ligne blanche ? Ou Faudra-t-il encore ordonner aux conducteurs circulant en milieu urbain de s’arrêter au feu vert et d’attendre le suivant de peur de contrevenir à un radar automatique de passage de feu ?! Est-ce là une responsabilité civique ?
D’autre part, comment le chef d’entreprise va gérer le compte de points de ses salariés, alors même qu’il ne peut agir sur leur vie privée. Avoir accès à cette information prochainement ne suffira pas. Et c’est donc pour des infractions bénignes que les salariés se verront déposséder de leurs points en peu de temps, venant par là même désorganiser l’exploitation de l’entreprise.

La situation ne peut rester en l’état. Si le gouvernement a souhaité engager la responsabilité du chef d’entreprise afin d’améliorer la sécurité routière, qu’il prenne aussi ses propres responsabilités en réformant le permis de conduire des professionnels routiers. Si un conducteur professionnel perd des points au cours de sa vie privée, l’activité de son entreprise ne peut et ne doit pas s’en trouver désorganisée. Et inversement. C’est pourquoi, le conducteur routier professionnel doit pouvoir bénéficier d’un permis professionnel
L’OTRE a fait depuis longtemps des propositions en ce sens. Nous sommes prêts à travailler sur ce dossier. La présidente Aline MESPLES l’a redit explicitement à Monsieur VIDALIES pendant leurs échanges lors de notre congrès. Soit le gouvernement actuel aura le courage de cette réforme, soit l’OTRE interpellera les futurs candidats à l’élection présidentielle pour qu’ils s’engagent fermement sur cette question. Il est impossible de laisser des dizaines de milliers de PME dans une situation intenable.

Source : Lettre d’information de l’OTRE

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