Réduction de CO2 : entre efforts et récompenses…

En plein cœur de la Normandie profonde (donc rurale !) le Président de la République vient de dialoguer avec 600 maires de cette région. Occasion pour lui de lancer le Grand débat national initié dans les 32 questions qu’il pose sa lettre aux français dès dimanche soir, 13 janvier.

Si dans son adresse écrite à la nation le chef de l’État a « balisé » le terrain du dialogue autour de quatre grands thèmes (fiscalité, organisation de l’État, transition énergétique, renouvellement démocratique), dans les réponses orales directes et spontanées qu’il a apporté aux questions des élus normands durant près de 7 heures, il s’est montré beaucoup plus large indiquant que toutes les suggestions et propositions seront les bienvenues même en dehors du cadre fixé par les 32 questions posées dans sa lettre.

Ce débat, ce dialogue saura-t-il remplir sa fonction ? Tentation d’une réponse… à la normande ! En tout état de cause, le débat est ouvert. Qu’il fasse sourire quelques-uns ou en fasse grogner d’autres, il est engagé. Dès lors pourquoi ne pas se saisir de cet espace qui s’ouvre ? L’OTRE, corps intermédiaire y jouera son rôle en y faisant entendre sa voix. Le thème de la transition énergétique retenu par le président lui en donne entre autres l’occasion !

Et précisément, hier 16 janvier lors de ses vœux à la presse, François DE RUGY, le ministre de la transition écologique et solidaire, en présence de la ministre des transports, a annoncé que la taxe carbone qui était prévue pour le 1er janvier sera finalement discutée lors du grand débat voulu par le président. Dans ce cadre, il a émis l’idée de mettre en place un dispositif pour « récompenser » celles et ceux qui font des efforts pour diminuer le CO2. Pour les transporteurs, il souhaite innover dans des dispositifs d’accompagnement pour l’achat de poids lourds propres. À cette occasion, le ministre a précisé : « Il ne s’agit pas de dire on va reprendre la taxe carbone telle qu’on l’avait connue jusqu’à présent. (…) La question qui sera en débat c’est bien sûr le niveau, le rythme (…) on peut en discuter, c’est normal, ça fait partie des choix politiques et des discussions démocratiques ».

Et comme la vertu de l’effort semble décidément à la mode, sans doute pour ne pas être en reste, François DE RUGY a indiqué que le transport routier devra faire un effort sur la baisse des émissions de CO2 rappelant les nouvelles normes pour les camions en Europe : « Pour la première fois, c’est passé inaperçu, l’Union européenne a décidé, à notre initiative, parce que nous avons mené le combat, de fixer des normes maximales de CO2 sur les poids lourds. Il y en avait pour les voitures, et les particuliers, les ménages, les français, pouvaient se dire, après tout, tous les efforts sont portés par les particuliers, nous allons continuer dans cette voie. » Mais beaucoup plus intéressant sans doute est la suite du propos ministériel : « La question de la taxation. Que ce soit la taxation du carbone ou du carburant. Oui, l’effort doit être partagé entre tous les émetteurs de CO2, les voitures particulières, les camions, les avions, les bateaux. Les français nous l’ont dit. » Les français ? Surement, ils ont dit tant de choses durant cette période agitée ! Mais depuis des mois et des mois, c’est aussi ce que dit l’OTRE. Loin des incantations ou des récupérations opportunistes des uns et des autres, notre organisation a toujours affirmé l’importance du partage de l’effort sur ce dossier.

Aussi nous ne pouvons que souscrire à la conclusion de François DE RUGY sur ce point précis : « Il y a différents dispositifs, il n’y a pas que la taxe. Tout cela devra être sur la table et dans tous ces domaines nous devrons progresser car, le fait que l’effort soit partagé, c’est une inspiration légitime des français. Nous devons y répondre concrètement. L’écologie du citoyen, c’est une écologie solidaire. »

Et qui dit effort oblige à son corollaire : récompense ! Pour les entreprises de transport qui renouvellent leur parc camions en véhicules propres, ils seront donc eux aussi récompensés. Comme le rapporte TRM24*, le ministre l’a confirmé : « Vous verrez, il y aura des dispositifs d’accompagnement pour les entreprises de transport pour l’achat d’utilitaires et de poids lourds « propres ». Reste à savoir sous quelle forme seront proposés ces dispositifs d’accompagnement qui s’apparentent comme un cadeau avant la sanction (vignette poids lourd ou autre). En clair, on punit les transporteurs polluants et on récompense ceux « propres ».

Sans doute faudra-t-il cette contrepartie, mais il est aussi essentiel de rappeler que la branche n’a pas attendu pour s’engager dans des programmes ou des engagements de réduction du CO2. La conviction du ministre n’est qu’un juste retour des choses !

 

Philippe BONNEAU
*Instantané TRM24 du 17 janvier 2019

 

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