Ouibus capacitaire du TRM ?

 

Ouibus, filiale de la SNCF, a annoncé la mise en place d’un partenariat avec la plateforme de livraison collaborative Cocolis, afin de permettre à des passagers d’emporter, en plus de leurs bagages, un colis qu’ils pourront remettre à leur arrivée à destination. Le « service » rendu par le passager est bien entendu rémunéré. En fonction du colis confié par « le donneur d’ordre » le prix varie : 5 € pour un trousseau de clés entre Bordeaux et Toulouse, 9 € pour un chargeur d’ordinateur entre Paris et Lyon ou 25 € pour une guitare entre Londres et Paris…

Et Ouibus n’est pas en reste en annonçant que : « En plus de cette participation à leurs frais de voyage, les voyageurs se verront également offrir un bon d’achat de 5 € pour leur prochain trajet Ouibus (…) Avec plus de 300 destinations européennes et plus de 4 millions de voyages effectués chaque année, Ouibus représente un immense réseau potentiel pour les colis à envoyer ». Une façon de valoriser un développement commercial concurrentiel mais sans avoir les mêmes obligations…

 

Ouibus va-t-elle devoir passer sa capacité de transport de marchandises en plus de celle de voyageurs ?

Si non, ne sommes-nous pas, là encore une fois, dans une forme officielle d’exercice illégal de la profession de transporteur de marchandises ? N’est-ce pas une nouvelle menace pour le transport express de petit colis ?

 

Poser la question, c’est y répondre…

Aline MESPLES, présidente de l’OTRE, a fait part de son indignation. Les voyageurs Ouibus ont le droit d’emporter deux bagages en soute, ce qui ne rentre pas en concurrence avec le transport de marchandises classique mais apparaît comme une nouvelle menace pour le transport express de petit colis.

Et c’est le représentant de la nation, le député Damien PICHEREAU, auteur du rapport sur les VUL qui tweete « @OUIBUS ceci n’est pas un véhicule de transport de marchandises ! Au-delà de l’évidente concurrence envers des acteurs du #TRM, comment comptez-vous participer à la lutte contre les trafics ? Oui à la #professionnalisation du #TRM, prôné par la #MissionVUL ! ».

Ce système à ses adeptes, ses thuriféraires même ! Il suffit de consulter les sites de ces adeptes de la comodalité pour prendre connaissance d’un florilège d’arguments qui tentent de vous convaincre que c’est le sens de l’Histoire. Et comme toujours, l’Allemagne citée en exemple : ce principe de transport de colis vient d’être mis en place à Brème… en accrochant aux autocars des remorques permettant de transporter des marchandises !

D’autres vont plus loin encore. Ils vous expliquent que les exemples de comodalité entre passagers et marchandises dans les autobus, autocars, métro, tramways, trains régionaux existent dans de très nombreux pays, sur tous les continents. Ils argumentent en expliquant que ce mode de transport permet de mieux rentabiliser les lignes rurales (sic), mais aussi d’apporter un service plus rapide de livraison de colis, y compris frigorifiques, dans des secteurs mal desservis… Et puis bien sûr, pour ces apôtres béats formés à une école économique où le troc pourrait être l’axe de développement, tout cela permet également au transporteur de réduire les coûts de livraisons…

 

Le transport routier de marchandises, une profession très réglementée

On ne peut être que stupéfait. Pas un mot pour les entreprises de transport concernées notamment par la logistique urbaine et la course. Ces entreprises soumises à des règles, à des obligations, à des devoirs. Pas un mot sur ce qui serait une concurrence déloyale, pas d’interrogations sur une forme d’exercice illégale de l’activité de transporteur. Pas un mot des autorités publiques alors même qu’une filiale d’une entreprise publique ne prend l’initiative à grand renfort de publicités et d’avantages pour le voyageur-prestataire… de transport !

Une fois de plus, nous ne nous tairons pas !

Philippe BONNEAU

 

Téléchargez l'article en PDF : Download PDF