Du devoir de chercher du travail…
Comment renforcer le contrôle des demandeurs d’emploi ?
Sans surprise, Emmanuel MACRON va durcir les sanctions contre les demandeurs d’emploi ne remplissant pas leurs obligations. Le président de la République avait présenté cette mesure comme une « contrepartie » à l’extension – finalement sous conditions – des droits aux démissionnaires et indépendants. Des sanctions « justes et crédibles », disait le candidat MACRON.
Dont acte !
Le gouvernement vient de dévoiler son arsenal rénové des sanctions contre les chômeurs qui ne remplissent pas leurs obligations. Les partenaires sociaux ont été reçus ce lundi au ministère du travail où leur ont été présentées ces mesures.
Elles figureront dans le projet de loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel ».
La volonté du gouvernement est de remettre à plat un système que la ministre du travail qualifie d’« incohérent » et de « pas logique ».
Aujourd’hui, ne pas se présenter à un rendez-vous est passible de deux mois de radiation, et donc de suspension des allocations, tandis qu’un demandeur d’emploi qui ne cherche pas assez activement un travail ne risque que deux semaines de radiation. Non seulement incohérent, mais injuste !
Le projet de loi entend rééquilibrer les contrôles et les sanctions. En cas d’absence, sans motif valable, à un rendez-vous avec son conseiller Pôle emploi, le demandeur d’emploi pourrait être sanctionné de deux semaines, tandis que les chômeurs ne cherchant pas d’emploi seraient plus sévèrement punis. Leurs allocations pourraient être réduites « soit de moitié, soit de façon dégressive, voire en totalité ». La durée de suspension, souvent autour de quinze jours aujourd’hui, passerait à un ou deux mois. Ce principe d’une révision du barème des sanctions pourrait figurer noir sur blanc dans la loi.
Le gouvernement veut aussi rendre « pleinement applicable » la notion d’« offre raisonnable » d’emploi, déjà définie très précisément dans le Code du travail depuis 2008. Dans les faits, cette sanction n’est quasiment pas appliquée. En 2013, 77 chômeurs ont été radiés pour ce motif, ce qui représente 0,01 % des 544 000 radiations totales.
De la même façon, l’allocation serait réduite de 50 % pendant deux mois (contre 20 % aujourd’hui) pour le demandeur d’emploi qui refuserait une formation ou deux offres d’emploi raisonnables, puis de les supprimer pour la même période en cas de récidive.
Enfin, les arbitrages sur la gouvernance de l’UNEDIC ont été également dévoilés aux partenaires sociaux. L’une des propositions consisterait à instaurer un système assez proche de celui qui prévaut pour le régime des intermittents du spectacle. Il fixerait un cadrage financier en amont : si les partenaires sociaux s’en écartaient, l’État reprendrait la main. L’Élysée indiquait, en octobre, vouloir « renforcer » le rôle de l’État, sans toutefois évincer totalement les syndicats et les organisations professionnelles. La ministre du travail Muriel PÉNICAUD jugeait récemment « essentiel » que « patronat et syndicats puissent discuter », comme ils le font aujourd’hui, des « règles » d’indemnisation, à savoir le « taux », la « durée » et les « modalités ».
Ces nouvelles mesures de contrôles et de sanctions ont déjà suscité la réprobation de celles et ceux qui y voient une stigmatisation de femmes et d’hommes aux prises avec les difficultés du quotidien et, somme toute, avec une forme de déchéance sociale parfois difficilement vécue lorsque le chômage devient de longue durée. Par ailleurs, toujours il y aura des profiteurs du système, quel qu’ils soient, loin d’être la majorité. Mais si il y a droit individuel à indemnisation en cas de perte d’emplois, il y a aussi devoir au regard du collectif. Devoir à l’égard de celles et ceux qui précisément assurent par leur travail un statut pécuniaire d’abord du demandeur d’emploi et, par extension, maintenir une forme de dignité sociale.
L’OTRE s’inscrit favorablement dans ce projet de loi apparaissant moins comme un durcissement des sanctions qu’un rééquilibre des obligations…
Philippe BONNEAU